La spatule

En ces temps d’absence totale de temps libre de qualité, j’ai envie de légèreté. Les sujets légers ne manquent pas dans le monde des célibataires, et ce n’est pas parce que le temps d’écrire correctement sur la nouveauté que je vais louper une occasion de vous sortir une théorie débile… Alors allons-y.

Gaël est l’ancien coloc de Maxime. Je l’ai croisé quelques fois en soirée, surtout dans son ancien appart, souvent en pyjama, rarement très attirant, mais toutefois très sympathique. Un soir, il a décidé de se joindre à un dîner que Maxime organisait chez lui pour Lorraine et moi, histoire de venir à bout de ces conserves de confit de canard qui encombraient les placards de sa cuisine. Il y a des choses qui se remarquent tout de suite chez certaines personnes. Chez Gaël, c’est notamment le fait qu’il a toujours faim -et pas de bouffe- qui m’a frappée. Ça et son absence totale d’expérience en matière de conversations de filles : c’est comme s’il avait découvert ce soir là que les filles pouvaient aussi parler de sexe.


 Lorraine et moi, faut pas nous chercher : fais ton coq deux secondes et tu vas nous trouver. Donc après s’être fait rembarrer deux fois pour avoir tenté d’enjoliver une situation, il a décidé de se détendre et de dire les choses telles qu’elles sont. Et de nous raconter comment il en était vraiment venu à coucher avec cette fille qui ressemblait à un Chewbacca gothique.

Gaël vient d’une petite ville où il rentre chaque fois qu’il en a l’occasion. Là-bas, il a ses potes de lycée, ses parents, peu de bars mais beaucoup d’ambiance tellement il connaît de gens. Et à Noël, après une longue période compliquée niveau filles et accessoirement baise, il était déterminé à mettre ces vacances à profit pour se soulager et commencer l’année du bon pied. C’était sans compter ses amis, l’alcool et les fêtes qui s’enchaînent à cette période de l’année. Les jours passent et les murges se succèdent, en un rien de temps on était déjà le 1er janvier et pas l’ombre d’un ramequin pour tremper son biscuit. Pas par manque de ramequins, mais par flemme de la part du biscuit… Le 1er janvier au soir, à 4h, déjà très atteint, il se dit que c’est ce soir ou jamais, puisqu’il partait le lendemain. Et le voilà en route vers un bar glauque qui ouvre jusqu’à 7h.

Gaël sait bien qu’il ne suffit pas d’en avoir envie pour que ça marche. Tout le monde sait ça. Mais au stade où il en était, sa bite n’avait pas d’œil et il s’était fait une promesse. Il boit encore quelques verres avec ses potes, histoire de se chauffer un peu, il rit, il passe un bon moment et… Merde, il est déjà 6h. Le bar s’est déjà considérablement vidé, il ne reste plus que quelques filles disponibles et dans un état lamentable. L’une d’entre elle dort sur le bar, deux autres dorment en bavant un peu sur les canapés élimés. Elles ont toutes un point commun : elles n’ont pas l’air facile à déplacer… Et c’est là que Gaël sort la spatule : la tchatche nécessaire pour décoller ces meufs pleines d’alcool de ce qui supporte leur poids. La spatule, c’est la technique qui marche à l’heure où ton haleine ferait faner une plante en bonne santé… Gaël jeta son dévolu sur une personne au look tout à fait unique et sombre et aux cheveux tellement plats et noirs qu’il les a suspectés de vouloir faire corps avec les contours de son visage.

Il faut être rapide et franc : « Ecoute, tu me plais et à cette heure-ci, de toutes façons, c’est moi ou rien. » Chewbacca scanne la pièce, regarde Gaël et se rend compte avec effroi qu’il a raison : il est sa dernière chance de se faire troncher ce soir. Il a menti : elle ne lui plaît pas, mais le désespoir n’empêche pas d’être poli…

Après ce récit, je n’ai pas pu m’empêcher de me demander si j’avais déjà spatulé. La réponse est oui, il y a bien longtemps. Je vous en reparle très bientôt…

A vous mes lecteurs ! Je veux des confessions. Que celui qui n’a jamais spatulé me jette la première spatule !