dimanche 28 novembre 2010

Le sexe contemplatif

Nous l’appellerons Soul Man pour diverses raisons. Abordé dans un bar d’une manière qu’il qualifiera plus tard de « subtile », il m’a donné des heures de conversations alambiquées à tendance philosophique, dans le bar d’abord, puis chez moi. Soul Man est un homme qui pense avant de parler. Ses silences ont un sens, ils donnent du poids à ses phrases qui tombent comme des déclarations solennelles de sentiments enfouis depuis très longtemps, comme s’il se confiait pour la première fois à quelqu’un.

Nous nous intriguons mutuellement, la curiosité se transforme vite en tension sexuelle, en désir incontrôlable. Il est immense, très bien fait et sa peau me rend folle. Mais ce soir là, point de sexe pour des raisons évidentes de place déjà prise par mon ami Tampax. Soul Man comprend et n’insiste même pas, alors nous parlons encore et encore jusqu’à sombrer dans un coma profond, en parfaite osmose intellectuelle. Le lendemain, il part en prenant mon numéro et me disant qu’il voulait absolument me revoir.



Les jours passent, nous décidons de nous revoir dans un bar, deux ou trois heures, pas plus. Nous sommes en pleine semaine, mon travail occupe 90% de mon temps de cerveau disponible, je n’ai pas envie de rassembler l’énergie nécessaire à une première nuit ce soir là. Je l’en informe donc, il me répond qu’il ne veut pas me voir pour ça, ni même pour récupérer la montre qu’il a oublié chez moi : il veut me voir, point.

Nous rions beaucoup, il me pose des questions, nous débattons sur des sujets profonds comme l’éducation, les relations, l’évolution de chacun en fonction des expériences. J’aime son esprit ouvert, j’aime sa compagnie. Aussi posément qu’il m’expose son point de vue sur l’auto-psychanalyse, il me décrit son désir et l’effet que lui fait ma peau, l’envie qu’il a de sentir mon corps, très élégamment et sans pression. Je trouve ça agréable et nouveau, j’ai envie de lui, notre première nuit promet d’être longue.

Puis nous nous séparons pour plusieurs semaines. Il voyage, je voyage, mais il prend toujours le temps  de m’appeler tous les 5 à 6 jours. Il me demande des nouvelles, veut savoir comment va ce mal de gorge qui me fatiguait tellement, quand est-ce que je rentre, quand est-ce qu’on peut se voir. Il me prie de ne pas m’excuser si je suis occupée, il veut me voir dans de bonnes conditions, reposée, disponible dans ma tête, ouverte à la nouveauté. Il me fait rire et me fait réfléchir : c’est la période, je me pose beaucoup de questions et j’aime entendre les points de vue des gens. Et la nuit tant attendue finit par arriver…

Après nos dîners respectifs, nous nous retrouvons chez moi. En partant de chez Lorraine, elle m’avait souhaité une bonne soirée avec Soul Man en espérant « qu’il ne soit pas trop gentil… » Et je le souhaite aussi : un mois s’est écoulé depuis notre rencontre et j’ai envie de lui physiquement… A son arrivée, nous nous installons dans le salon -que Julia avait très gentiment déserté- pour boire un verre. Même conversation posée, même contemplation, mêmes silences. En arrivant dans la chambre, le déshabillage est lent, plein de caresses. Il prend son temps et me le dit, il veut aller très doucement. Je me laisse faire cinq minutes, il me bascule sur le ventre et entreprend d’explorer chaque centimètre carré de peau. Dix minutes passent, il vient à peine d’effleurer ma culotte, je suis ultra excitée, je n’ai pas l’habitude de me laisser faire comme ça, d’autant qu’il m’interdit de le toucher pendant qu’il s’occupe de moi. Au bout de 20 minutes, je fais une nouvelle tentative ratée. Au bout de 30 minutes, la Sunday patiente est loin, très très loin, et son excitation aussi. Je reprends les choses en main.
Quand je me mets au dessus, je le sens mal à l’aise. Je descends progressivement pour lui enlever son caleçon et découvrir ce qui le met vraiment mal à l’aise. J’essaie de ne pas le brusquer, j’y vais doucement, mais il n’a pas l’air d’apprécier. Je lui demande si tout va bien, il me répond que ce n’est pas vraiment son truc…

Le lendemain, j’arrive enfin à obtenir une pénétration. Soul Man maîtrise le coup de rein chaloupé, c’est extrêmement agréable mais encore et toujours terriblement lent. Il fait des pauses, me regarde, me couvre de compliments, et je finis par décrocher. Nous nous arrêtons. J’ai mis un temps fou à le faire dégager, je devais me mettre à travailler et il avait décidé d’investir mon lit jusqu’à 14h. A 13h, après plusieurs tentatives de réveil et n’en pouvant plus d’être dans le salon en le sachant dans ma chambre, je le vire un peu brusquement.

Au téléphone, Lorraine prend des nouvelles : « Alors, la nuit tant attendue ?
-    Euh… Pas top…
-    Comment ça ?
-    Bah… Préliminaires trop longs avec interdiction formelle de faire quoi que ce soit…
-    Oh bah c’est sympa ça, non ?
-    Une demie-heure…
-    Ah oui, effectivement… Et ensuite ?
-    Et ensuite, j’ai découvert le pot au rose…
-    Non mais toi t’as toujours l’impression qu’elles sont petites parce que t’es habituée aux gourdins.
-    Lorraine, je ne peux pas le sucer et le branler en même temps…
-    …
-    Et en plus, j’ai l’impression qu’il a pas très envie que je lui fasse quoi que ce soit quoi… Comme s’il aimait pas ça.
-    Oui, on est bien d’accord que le fait que tu puisses pas le branler et le sucer en même temps serait secondaire si… Attends, ça arrive souvent ça en fait !
-    Bah je suis d’accord que j’ai des grandes mains mais ça m’est pas arrivé souvent non.
-    Bah moi j’arrive pas à me souvenir… Je verrai ça la prochaine fois.
-    Oui, pense bien à moi à ce moment là, j’adore l’idée. »

Je voudrais mettre les choses au clair : prendre soin de sa partenaire c’est chouette. Mais le sexe doit quand même rester un échange, et m’empêcher de faire des trucs parce que tu as peur de ma réaction ou peur que je n’en fasse qu’une bouchée (sans mauvais jeu de mots…) n’est pas quelque chose d’agréable pour ta partenaire. C’est extrêmement humiliant même, j’ai l’impression que tu ne me fais pas confiance.

Le résultat est le suivant : Soul Man passe pour un mec complètement bidon qui a construit de toute pièce une aura de mystère pour finalement révéler que le mystère est un manque d’assurance. Je n’ai rien contre les mecs qui ne sont pas sûrs d’eux, mais j’en ai marre des mecs qui se vendent d’une certaine manière et finalement n’assurent pas derrière. Quand il parlait de sexe comme de quelque chose d'extrêmement fort, quand il parlait de tout ce qu'il me voulait me faire... Il m'a vendu du rêve. En fait, ça me ferait le même effet d’acheter une bouteille de Coca sans bulles : tromperie sur la marchandise...

Au revoir, Soul Man.

5 commentaires:

  1. Oui j'ai pensé à toi à ce moment LA! Petit fou rire interne et du coup déconcentration. Mais je pouvais faire les 2 en même temps moi!

    Adios Soul Man...publicité mensongère, c'est bien d'être gentil et doux mais ça suffit pas. Dommage, on y avait cru.

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  2. Ouais, vendu du rêve c'est le mot, y avait de quoi être déçue. J'ai eu un truc du même genre un jour et bizarrement je n'ai plus donné suite..!

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  3. Bon ben l'heure du brunch du sunday est passée depuis un moment et pas de post en vue...

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  4. Dis donc, c'est pas super ça!
    En fait, Mr Tampax tombe toujours au mauvais moment ; si il n'avait pas été là le premier soir, tu aurais été rapidement fixée!

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  5. @K'ro : Je vais éviter de donner suite oui... Et bienvenue dans les commentaires !

    @Lilith : Tu m'étonnes, les règles ça fait perdre un temps fou !

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